15 juin 2023

Le Luxembourg est-il heureux au travail ? Les impacts de la mauvaise ambiance au travail et comment améliorer la satisfaction de l’employé.

Une mauvaise ambiance de travail a-t-elle un impact sur une entreprise et que pouvons-nous faire pour améliorer la satisfaction des employés ? Nous avons parlé à David Büchel, psychologue à la Chambre des salariés, qui nous donne cinq conseils utiles pour augmenter notre bonheur au travail.

1. Monsieur Büchel. Au niveau du bien-être et de la satisfaction au travail, comment nous comparons-nous au reste de l’Europe ?

Le bonheur est un concept qui va au-delà de la vie professionnelle. Il est important de noter que la mesure du bien-être mental est complexe et qu'elle doit prendre en compte les aspects physiques, émotionnels, sociaux et spirituels de l'individu.

Si on se limite à l’aspect de la satisfaction au travail, l’enquête sur les forces de travail (EFT) permet de comparer les travailleurs des différents pays européens en matière de satisfaction au travail.

Si l'on considère les chiffres pour l'année 2021, la satisfaction des travailleurs au Luxembourg semble certes élevée en absolu, quelque 86% de personnes se déclarant satisfait de leur travail, dont 51,7 % sont "plutôt satisfait" et 34,8% sont "tout à fait satisfait” (). Cependant, le pays se situe en bas du classement des pays européens (29e parmi 31), devant la Lituanie et la Slovénie et derrière la Bulgarie et le Portugal. Avec 98% de sondés satisfaits, la Hongrie arrive en tête, suivie par la Norvège, la Lettonie et le Danemark.

Toutefois, il faut savoir que ces statistiques prennent en compte que les travailleurs résidents mais pas les travailleurs frontaliers. Bien sûr, il y a également une variation importante en fonction de la profession avec les plus satisfaits de leur travail les agriculteurs, les métiers qualifiés et les managers, dirigeants et cadres.

Le personnel des services directs aux particuliers (coiffeurs, serveurs, guides, concierges, etc.) est moins souvent satisfait au travail.

2. Le Luxembourg est multiculturel et multilingue. Quel impact constatez-vous sur le lieu de travail ?

Qui dit multitude de cultures et de nationalités dit aussi multitude de langues. Ceci implique que la capacité à parler plusieurs langues est très appréciée sur le lieu de travail au Luxembourg. De nombreuses entreprises exigent de leurs salariés qu'ils maîtrisent au moins deux des trois langues officielles du pays (le luxembourgeois, le français et l'allemand), et certaines exigent également la maîtrise de l'anglais ou d'autres langues en fonction de la nature de leurs activités.

La multiculturalité de la main-d'œuvre du Luxembourg amène des personnes ayant des origines, des expériences et des perspectives différentes à travailler ensemble. Cette diversité peut aider les entreprises à être plus innovantes et créatives, ainsi qu'à mieux

répondre aux besoins d'une clientèle diversifiée, mais elle exige également des entreprises qu'elles soient sensibles aux différentes normes culturelles et qu'elles promeuvent activement l'inclusion et la diversité.

Le Luxembourg est une plaque tournante de la finance et des affaires internationales avec de nombreuses entreprises qui ont une vision globale et un réseau de relations internationales. Pour les salariés, cela représente des opportunités de pouvoir travailler sur des projets internationaux, de développer des compétences globales et de construire des réseaux professionnels qui s'étendent au-delà du Luxembourg.

3. Les gens quittent leur emploi pour diverses raisons, alors comment les chercheurs mesurent-ils la « satisfaction des employés » ?

La satisfaction au travail est mesurée par des enquêtes et des questionnaires spécifiques conçus pour évaluer les perceptions, les attitudes et les opinions des travailleurs à l'égard de leur travail et de leur environnement de travail. Souvent la satisfaction au travail est mesurée par une simple question sur le degré de satisfaction, qui doit être déterminé sur une échelle de mesure à 4 ou 5 niveaux allant de « très satisfait » à « pas du tout satisfait ».

Toutefois, la satisfaction au travail s'avère être une construction complexe dans laquelle les processus d'adaptation et de comparaison jouent un rôle important. Cette approche ne permet pas, par exemple, de faire la distinction entre les travailleurs motivés et les travailleurs résignés (insatisfaits mais qui ne veulent ou ne peuvent pas changer de situation professionnelle). Il n'est donc pas conseillé de se baser uniquement sur l'indicateur de satisfaction au travail pour obtenir un aperçu complet du bien-être des salariés.

C'est pourquoi des enquêtes plus complètes, comme le « Quality of Work Index »1 font principalement appel à des indicateurs multiples, à la fois objectifs et subjectifs, pour mesurer la qualité du travail. Les thèmes tels que les exigences mentales et émotionnelles du travail, les horaires de travail, la collaboration avec les collègues, la marge de manœuvre dans le travail, la satisfaction par rapport à la rémunération, les possibilités de formation continue et de promotion, l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée et bien d'autres encore sont pris en compte.

D’autres méthodes comme les données administratives (taux de rotation, absences au travail, nombre de plaintes...) et les entretiens de groupes focalisés peuvent être utilisées pour compléter la démarche de l’évaluation des risques d’insatisfaction au travail dans l’entreprise.

4. À quelles menaces les employeurs sont-ils confrontés lorsqu'ils négligent la satisfaction des employés ?

L’insatisfaction au travail est un frein à la motivation et génère stress et frustration chez les salariés. Cela peut avoir un impact immédiat et différé sur les performances globales de l'entreprise, ainsi qu’impliquer des coûts importants.

Tout d'abord, le stress peut entraîner des troubles psychosomatiques, des maladies mentales telles que l'anxiété et la dépression, mais aussi l’épuisement professionnel (burnout) et engendre donc une augmentation de l'absentéisme à court, moyen et long terme.et

En outre, un climat de stress peut favoriser les accidents dus à l'inattention et au surmenage ou les agressions violentes liées à des conflits avec des collègues ou des clients, avec pour conséquences des dommages physiques et/ou mentaux, qui entraînent à leur tour des absences pour cause de maladie.

De même, les travailleurs qui sont malheureux ou insatisfaits de leur travail, même s'ils ne sont pas en congé de maladie, peuvent être moins motivés à donner le meilleur d'eux-mêmes au travail, ce qui peut entraîner une baisse de la productivité et de la qualité du travail. Cela peut avoir un impact négatif sur les performances globales et la rentabilité de l'entreprise.

C'est surtout dans le service à la clientèle qu'une mauvaise ambiance de travail devient rapidement visible. Les employés qui sont malheureux ou insatisfaits de leur travail peuvent être moins enclins à fournir un service client de qualité, ce qui peut avoir un impact sur la satisfaction des clients et entraîner des pertes commerciales.

Les employés insatisfaits de leur travail, sont plus susceptibles de quitter l'organisation à la recherche de meilleures opportunités. Un taux élevé de rotation du personnel peut être coûteux pour les employeurs, qui doivent consacrer du temps et des ressources à la recherche, au recrutement et à la formation de nouveaux collaborateurs pour remplacer ceux qui ont quitté l'entreprise.

Enfin, les travailleurs qui quittent leur emploi en raison d'expériences négatives et d'une mauvaise ambiance de travail ne sont pas forcément la meilleure publicité pour une entreprise. Un environnement de travail négatif avec un niveau élevé d'insatisfaction des employés peut nuire à la réputation d'une entreprise. Cela peut rendre plus difficile le recrutement de talents de haut niveau et peut également nuire aux relations de l'entreprise avec ses clients, ses fournisseurs et d'autres parties prenantes qui prennent la responsabilité sociale au sérieux.

5. Quels sont vos cinq conseils utiles pour nos lecteurs qui veulent se sentir plus heureux au travail ?

Les cinq conseils utiles : 

  1. Entretenez des relations positives avec vos collègues et vos supérieurs. Cela vaut la peine d'écouter activement et de faire preuve d'empathie et de gentillesse.

  2. Donnez la priorité à l'autosoin. Cela implique de dormir suffisamment, de faire de l'exercice et de manger sainement. Faites des pauses lorsque vous en avez besoin et déconnectez-vous du travail lorsque vous n'êtes pas en service.

  3. Parlez à un collègue, votre supérieur ou votre délégation du personnel si vous rencontrez des problèmes de conflits, de charge de travail ou d'horaires. Parler d'un problème est le premier pas vers la solution.

  4. Réfléchissez à ce qui vous motive, à ce que vous aimez faire et à la manière dont votre travail contribue à un objectif ou à une mission plus large. Il est important d'avoir le sentiment de faire quelque chose d'utile dans son travail.

  5. Confiez-vous à quelqu’un si vous ne savez pas comment gérer votre problème tout seul, p.ex. votre médecin de famille, un psychothérapeute, un psychologue, un coach ou au service de consultation psychologique gratuit : stressberodung@csl.lu ou 27 494 – 222.

À propos du blog : 

 

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